Dagesh IV
Précédente Accueil

 

L'absence de dagesh faible après un sheva immobile (ajout du 9/9/2007)

On considère souvent qu'un בגדכפת après un sheva immobile contient nécessairement un dagesh qal. Ce n'est pas exact. Et même si certaines grammaires mentionnent l'existence d'exceptions on a souvent tendance à les négliger pour 3 raisons :

bullet

Les exceptions sont souvent non décrites, ou réduites à un ou deux cas (dont le célèbre מַלְכֵי)

bulletLes cas d'exceptions inventoriés ne sont pas exhaustifs
bulletL'analyse de ces cas conduit de nombreux auteurs à se focaliser sur le statut du sheva qui précède, ce qui selon moi est une erreur.(Cf Sheva Merahef)

Je vais donc tenter de faire un point sur ce sujet qui est loin de constituer un cas rare. A titre d'exemple, on en trouve 14 dans le premier chapitre de la Génèse, dont 5 dans Génèse I-28. Des textes très connus du pentateuque (comme le kiddoush du vendredi soir, ou le shema) en portent plusieurs.

Exemples :

Les shevas sous les lettres en rouge sont immobiles. Ils sont suivis d'une בגדכפת. Cette dernière devrait prendre un dagesh faible mais n'en prend pas.

Ce phénomène a déclenché des tergiversations de "grammairiens" récents tendant à affirmer que le sheva qui précède (en rouge) n'est pas immobile. Ces manières de voir sont est traitées dans Sheva IV article Sheva Merahef.

La phonétique permet généralement de comprendre ce qui se passe.

La situation est expliquée généralement par le processus suivant.

 On part d’une situation où 2 sheva mobiles doivent apparaître, généralement en début de mot.

Le mot דָּבָר  à la forme construite est raccourci en דְּבַר.

Si on lui ajoute une préposition,  on obtient a priori  בְּדְבַר. Dans ce mot hypothétique, les deux sheva sont mobiles, chose que l'hébreu n'aime pas.

 Le premier sheva se transforme alors en voyelle brève. Dans le cas de préfixes ב, il s’agit d’un i court, בִּדְבַר.

Du fait des règles usuelles sur le sheva, ou de la règle d'argent, le deuxième sheva devrait alors devenir immobile, et la consonne suivante devrait prendre un dagesh. On obtiendrait alors בִּדְבַּר.

Le processus ne se produit pas complètement. D'où l'orthographe sans dagesh constatée.

De même avec le mot מֶלֶךְ. Ce mot comme tous ceux de sa famille qui ont deux segols en fin de mot ont un certain nombre de particularités.

A la forme construite plurielle, l’évolution phonétique du mot à la forme construite pluriel devrait probablement aboutir à une forme מְלְכֵי par raccourcissement du qamatz de מְלָכִם.

Le double sheva initial étant impossible, le premier sheva devient une voyelle auxilliaire, un patah. Du fait des règles sur le sheva et de la règle d'argent, et des règles sur le dagesh, on devrait obtenir, מַלְכֵּי.

Le processus ne va pas jusqu'au bout et on obtient מַלְכֵי

 

On a donc 3 règles qui devraient s'appliquer successivement

  1. 2 shevas mobiles ne peuvent cohabiter

  2. Une voyelle brève non accentuée est fermée ou mieux les règles du sheva font que le sheva devient immobile.

  3. Une בגדכפת précédée d'un sheva mobile prend un dagesh.

Apparement, elles ne le sont pas toutes.

Etudions les cas possibles. Les premiers sont tous des cas de préfixes avant un sheva mobile.

Préfixe כלב avant sheva mobile.

Quand un préfixe כלב sans article est placé avant un sheva mobile, on est en situation d'avoir deux sheva mobiles, en début de mot. Impossible. Le premier d'entre eux est donc remplacé par un hiriq. Du fait des lois du sheva, le sheva qui suit est immobile. Mais cette immobilisation secondaire ne suffit pas à rendre la בגדכפת occlusive.

Au moins 2 exceptions en vert :

bulletCette effet ne s'applique pas à l'article ל avant un infinitif qui n'empêche pas le dagesh léger d'apparaître.
bulletUn préfixe avant שְׁתֵּי et שְׁתַּיִם ne fait pas disparaître le dagesh.

Préfixe וּ avant sheva mobile.

Un vav conjonctif avant une labiale (בומף) ou avant un sheva est transformé en shourouq. Ce shourouq est considéré comme court. Donc s'il est suivi d'un sheva, ce dernier devient immobile. Dans ce cas également, une lettre בגדכפת qui suit ne prend pas de dagesh :

Vav conversif avant sheva mobile.

Le vav conversif qui transforme le futur en passé est porteur d'un patah non accentué qui réclame une syllabe fermée.

Quand il est suivi d'un א c'est impossible. Quand la consonne qui suit porte une voyelle, la fermeture se fait par un dagesh. Quand il est suivi d'un תְ ou d'un נְ, la fermeture se fait également par un dagesh. Le sheva reste mobile (exemples en vert).

Quand il est suivi d'un י porteur d'une sheva, alors c'est le sheva qui devient immobile. Et là encore, le בגדכפת qui suit ne prend pas de dagesh.

Ce cas concerne donc la 3ème personne des verbes au pi'el et au pou'al dont la deuxième lettre est un בגדכפת.

Article suivi d'un sheva mobile

Exemple proche du précédent, ou un dagesh devrait apparaître mais n'apparaît pas. Il s'agit des cas où un article avant un mot començant par une consonne porteuse d'un sheva mobile, et où la fermeture de la syllabe ne se fait pas par un dagesh, mais par la transformation du sheva mobile en immobile.

Si la deuxième lettre du mot est un בגדכפת, ce dernier ne prend pas de dagesh.

Certains ouvrages mentionnent "Les shevas qui auraient du être sous un dagesh". Les seuls exemples que je connais sont ceux des 2 chapitres précédents.

Je suis preneur d'autres cas.

Certaines formes des mots en shesh neqoudot (ségolés)

Les mots qui se terminent par 2 segols (ou certains mots de même catégorie où le segol est transformé), subissent des transformations vocaliques en cascade qui peuvent aboutir au cas qui nous préoccupe.

Certains mots de cette catégorie (כסף  et נסך) gardent le dagesh en toutes circonstances. Certains ouvrages disent que cette caractéristique est commune à tous les mots qui ont un ס en deuxième lettre. Mais l'exemple de חסדי montre que ce n'est pas toujours le cas.

Certaines formes verbales.

Détails à affiner.

Les mots en כֶם et כֶן

Les mots prenant un suffixe en כֶם et כֶן ne prennent jamais de dagesh quand il sont précédés d'un sheva mobile.  L'auteur du site n'a pas trouvé d'exemples en כֶן.

Exception en vert : Il semble même que le seul et unique cas où ce suffixe prend un dagesh est le mot מִכֶּם en raison de la chute du נ de מִן.

Le cas de מִכֶּם est particulièrement intéressant. La règle qui dit que le מ est suivi d'un dagesh à cause du נ qui est tombé semble toujours inutile, car on peut invoquer le fait que le hiriq est bref non accentué et implique une syllabe fermé.

L'exemple de מִכֶּם montre que même dans les cas où l'argument général pour mettre un dagesh ne s'applique pas, le מ en implique un quand même. Cela signifie qu'il y a une raison majeure et plus forte pour mettre un dagesh. C'est le fameux נ qui a disparu.

Les mots en ךָ

De même les mots terminés par le suffixe  semblent ne jamais prendre de dagesh qal, même s'il arrive (très rarement) qu'il prennent un dagesh hazaq (en vert) en forme pausale. Voici, en rouge, quelques exemples où ils sont précédés de sheva immobile et n'ont pas de dagesh dans le ך :

Et d'autres :

 

 

Dagesh dans alef et resh

Il existe 4 cas dans la Bible où un א possède un dagesh fort (Je donnerai cher pour savoir comment on redouble un א à la lecture).

Et 17 cas de ר ayant un dagesh :

Ce sont des cas où le dikdouk n'explique pas grand chose.

Quant au lecteur qui voudrait ajouter un livre à la Bible, je lui laisse déduire de ces quelques cas (et des quelques éléments répétitifs qui s'y trouvent) quelles sont les règles qui font qu'on ajoute un dagesh à ces 2 lettres.