Préfixes II
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L'article défini

L'article défini הַ porte une voyelle brève non accentuée. En vertu de la règle d'argent, cela implique que la consonne qui suit porte un dagesh fort ou un sheva immobile. En fait, l'article défini demande un dagesh fort.

Si la première lettre du mot est une gutturale ou un ר, il se produit généralement un paiement du dagesh et la voyelle du ה devient longue. Dans quelques cas, le paiement n'a pas lieu, et l'on se trouve dans une des exceptions à la règle d'argent (voyelle brève ouverte non accentuée).

La règle précise est :

Devant א et ר la voyelle est הָ

Devant un ע : généralement הָ sauf si c'est un עָ (long) non accentué, alors הֶ

Devant un ה : généralement הַ sauf si c'est un הָ (long) non accentué alors הֶ, si c'est un הָ accentué c'est un הָ.

Devant un ח : généralement הַ sauf si  חָ (long) ou חֳ auquel cas הֶ

Si un mot commence par un sheva mobile, l'introduction du dagesh dans la première consonne maintient le sheva mobile (à la différence des préfixes וכלב).

Parfois, devant un sheva sous la première consonne, on ne met pas le dagesh et on a un sheva immobile. Cela se produit devant un י (sauf s'il est suivi d'un ה d'un ו ou d'un ע), devant un מ préfixe d'un verbe (sauf s'il est suivi d'un ה ou d'un ע), et parfois dans d'autres cas (cf parasha Vaera) .

Voici quelques exemples pris dans la Bible qui illustrent chacune de ces règles. Je suis incapable d'expliquer les exemples entre parenthèse avec les règles que l'on trouve généralement dans les grammaires :

Le vav conjonctif

Quand le vav signifie "et", il est généralement vocalisé avec un sheva.  Exemple :

וַיְכֻלּוּ הַשָּׁמַיִם וְהָאָרֶץ וְכָל-צְבָאָם

Il ne réclame pas de dagesh fort après. En revanche, si le mot commence par בגדכפת, la présence d'un préfixe retire le dagesh faible. Dans l'exemple, la lettre en vert porterait un dagesh si le vav n'était pas là.

Devant une consonne labiale (בומף), ou devant un sheva, le vav se transforme en voyelle (shourouq).

וּבְאֶרֶץ
גֹּמֶר וּמָגוֹג
וּלְמַטֵּה 

Dans le dernier cas, le sheva qui est mobile en début de mot devient immobile après le vav. כְּנַעַן se prononce ké-na-ane, tandis que וּכְנַעַן se prononce Oukh-na-ane.

A COMPLETER : Cas du meteg sous le vav

Ce וּ initial est très atypique en hébreu. C'est le seul cas où une voyelle n'est pas associée à une consonne. De plus il est généralement considéré, qu'en cette position, c'est une voyelle courte.

Ceci explique que le sheva qui suit soit immobile. Car après une voyelle longue (naturellement) non accentuée, on devrait avoir un sheva mobile.

Comment le וּ figure-t-il dans la décomposition en syllabe ? Cf Syllabe II

Devant un י doté d'un sheva, le י perd son sheva, et le ו reçoit un 'Hiriq, qui est alors une voyelle longue en raison de la présence du yod :

יְהוּדָה וִירוּשָׁלִַם

Dans des expressions toutes faites, le ו est souvent vocalisé d'un qamatz :

תֹהוּ וָבֹהוּ
יוֹמָם וָלַיְלָה
שָׁמַיִם וָאָרֶץ

Il l'est également parfois quand le vav est suivi d'une syllabe accentuée avec un ta'am fort (pause) :

Le vav avant une consonne dotée d'un hataf prend la voyelle qui colore le hataf, sans le sheva associé. Exemples :

וֶאֱמֶת
חֶלְקַת וַחֲלִי
מַכּוֹת גְּדֹלֹת וְנֶאֱמָנוֹת וָֽחֳלָיִם רָעִים וְנֶֽאֱמָנִים

Dans le dernier cas, la question se pose de la prononciation du qamatz (cf discussion dans Voyelles III). Je considère qu'il se prononce a, et un indice supplémentaire en est donné par le meteg.

Les préfixes כלב

Les trois préfixes כ ל ב suivent les mêmes règles, lesquelles sont proches de celle du vav conjonctif.

Normalement, il prennent un sheva (qui est mobile si c'est le premier préfixe du mot), s'ils ne sont pas associés à un article défini.

La lettre qui suit ne prend jamais de dagesh. Exemple : בְּבֵיתְךָ (se prononce Bévé-tekha)

Devant une voyelle vocalisée d'un sheva (mobile), le sheva du préfixe ne peut subsister, car 2 sheva mobiles consécutifs en début de mot sont interdits. Le préfixe prend un hiriq court, et le sheva qui suit devient immobile. Exemple : בִּגְבוּרָה (big-vou-ra)

Devant un י doté d'un sheva, le sheva tombe, et le préfixe se voit doté d'un hiriq allongé par le youd. Exemple : בִּירוּשָׁלָיִם

Devant un hataf, le préfixe prend la voyelle qui colore le hataf (sans son sheva) :

בֶּאֱמֶת
בַּאֲבִימֶלֶךְ
לַאֲבִימֶלֶךְ
כָּֽאֳנִיּוֹת

Dans, le dernier cas, la controverse du qamatz surgit  (cf Voyelles III). Je considère que le qamatz se prononce a, et un indice supplémentaire en est donné par le meteg.

Si le préfixe est suivi de l'article défini, ce dernier n'apparaît pas en tant que consonne. Mais sa voyelle passe sous le préfixe.

Exemple : בַּבָּקָר=בְּ+הַ+בָקָר

Dans ce cas, toutes les règles sur la vocalisations de l'article s'appliquent.

D'où le célèbre cas :

Si on prend un mot commençant par un alef avec un article défini, on préfixe avec בָּ.

Si on prend un mot commençant par une consonne doté d'un hataf-qamatz, sans article défini, on préfixe également de בָּ.

Donc :

Dans un bateau s'écrit בָּאֳנִיָּה, dans le bateau s'écrit également בָּאֳנִיָּה. Le fidèle lecteur sait bien que les deux se prononcent ba-oniy-ya. Mais les autres peuvent aller voir la controverse sur le qamatz.

A COMPLETER : devant mot court ou syllabe accentué

Le préfixe מ

Généralement, ce préfixe s'écrit מִ et est suivi d'un dagesh fort.  Exemple : מִקָּטֹן

2 raisons peuvent être avancées pour le dagesh :

bulletCelle qui dit que nous avons une voyelle brève non accentuée, et que sa syllabe doit être fermée.
bulletCelle qui dit que ce préfixe vient de la contraction de מִן.

Le deuxième argument est un peu plus fort, car il évite le cas où dans un mot commençant par un sheva, on ne met pas le dagesh, et le sheva devient mobile.

(dans le deuxième cas le mot מִלְמָעְלָה sans dagesh dans le ל est incompréhensible).

Devant une lettre ne pouvant porter de dagesh (אהחער), le מ prend généralement un tsere  :מֵאַרְצְךָ ou מֵחָרָן. Parfois, il garde le hiriq (absence de paiement du dagesh) : מִחוּץ. On a donc une consonne brève ouverte non accentuée (violation de la règle d'argent)

Devant un י porteur d'un sheva, le מ prend un hiriq qui s'allonge en s'agglomérant au י qui, de ce fait, perd sont sheva : מִירוּשָׁלָיִם

Contrairement aux préfixes כלב, le préfixe מ n'absorbe pas l'article défini. En revanche, l'article défini commençant par une gutturale, il implique un tsere dans le מ.

Exemple : מֵהַבְּהֵמָה

Cette forme est très rare dans la bible qui préfère מִן הַ־.

Le préfixe ש

Le ש prend un segol, et est suivi d'un dagesh hazaq quand la lettre qui suit le permet.

Quand la lettre qui suit le ne peut pas prendre de dagesh (אהחרע), la voyelle ne change pas. Pas de paiement du dagesh.

Ce préfixe est très rare dans la Bible qui généralement utilise אשר.

Le vav conversif

Le vav conversif est le vav qui, placé en début de verbe transforme un passé en futur, et un futur en passé. C'est un sujet assez délicat. Nous donnerons sur ce site des règles de base. Se référer aux ouvrages spécialisés pour aller plus loin.

Du passé au futur

Le vav qui converti le passé en futur se vocalise comme un vav conjonctif : 

bulletוְ en général
bulletוּdevant une consonne בומפ ou dotée d'un sheva.  Le sheva devenant alors immobile.
bulletDevant un hataf, prend la voyelle du hataf.
bulletDevant un youd et un sheva, le sheva s'en va et le youd devient voyelle du vav.

Exemples : וְשָׁחַט, וּכְתַבְתָּם ,וַעֲשֵׂה, וִירִשְׁתֶּם

Quand la forme passée est mille'el, la forme convertie devient souvent millera'.

 אָהַבְתָּ, tu as aimé, est mille'el. La forme וְאָהַבְתָּ, tu aimerais, est millera'. Attention, un  וְאָהַבְתָּ mille'el sera soit un passé doté d'un vav conjonctif (et tu as aimé), soit le résultat d'une autre règle tendant à déplacer l'accent (pause, par exemple).

Quand la forme passée est mille'ra, seul le contexte permet de deviner si le vav est inversif ou conjonctif . וְשָׁמְרוּ avec un meteg sous le shin (vesha-merou) peut vouloir dire "Et ils ont gardé" ou "Ils garderont"

Du futur au passé

Le vav qui convertit le futur en passé suit des règles proches de l'article défini. Mais les cas particuliers ne sont pas aussi complexes. En effet, ce vav est forcément suivi d'un verbe au futur, donc d'un préfixe איתנ.

Il est généralement vocalisé d'un patah וַ et suivi d'un dagesh. Exemples : וַיָּבֹאוּ  vay-ya-vo-ou, ils sont venus ou l'omniprésent וַיֹּאמֶר , vay-yo-mer, il a dit.

Seul le א ne peut pas porter de dagesh. Dans ce cas, le vav porte un qamatz : וָאֶקְרָא, וָאֵלַךְ

Comme pour d'autre préfixes impliquant dagesh, il arrive que quand la première consonne du verbe (notamment le י) porte un sheva, on ferme le patah non pas avec un dagesh, mais avec un sheva immobile : וַיְדַבֵּר se prononce vay-dab-ber (et non vay-yedab-ber)

A l'inverse du ו qui transforme le passé en futur, ce ו change parfois les millera' en mille'el. Exemple : יְבָרֵך mais וַיְבָרֶךְ (d'autres considérations phonétiques interviennent dans ce changement d'accent, voir les ouvrages spécialisés).

De toute manière, la vocalisation de ce vav étant différente du vav conjonctif, l'accent n'est pas utile pour l'identifier :

וִיבָרֵךְ "et il bénira", וַיְבָרֶךְ "il a béni".
וַאֲדַבֵּר
,"et je parlerai"  וָאֲדַבֵּר "j'ai parlé".

Je laisse le lecteur analyser ces 2 cas.

De même, ce vav a tendance à raccourcir, voire à changer, les voyelles des dernières syllabes ( יָקוּם donne וַיָּקָם avec un qamatz court, vay-ya-qom) , voire à supprimer les dernières consonnes des verbes (יֵעָשֶׂה devient וַיַּעַשׂ).

Le ה interrogatif ou ה sheela.

Généralement, le ה interrogatif est doté d'un hataf-patah.

Devant une consonne dotée de sheva ou d'un hataf, il prend un patah, pour éviter deux sheva consécutifs en début de mot (un hataf étant un sheva mobile). Mais la voyelle qui suit ne prend pas de dagesh fort.

Devant une gutturale, il prend également un patah. (Cette règle ne s'applique pas devant un ר car elle n'est pas due à l'impossibilité de mettre un dagesh).

Si la gutturale prend un qamatz long, il prend un segol.

Exemples :
הֲ
שֹׁמֵר אָחִי אָנֹכִי
: Suis-je le gardien de mon frère? Avec un hataf-path.
הֲיוֹדְךָ עָפָר
- הֲיַגִּיד אֲמִתֶּךָ : La poussière te loue-t-elle ? Dit-elle ta vérité ?
הַ
עֶבֶד יִשְׂרָאֵל
: Israel est-il esclave ?     A distinguer de :     וַיֹּאמֶר אֵלָיו הָעֶבֶד : Et l'esclave lui dit . (qamatz au lieu de patah).
הַבְרָכָה אַחַת הִוא־לְךָ אָבִי
:
N'as tu pas une seule bénédiction, mon père ?    A distinguer de :    וְזֹאת הַבְּרָכָה : Et ceci est la bénédiction. (Avec dagesh au lieu de rafé)
וּמִי יוֹדֵעַ הֶחָכָם יִהְיֶה אוֹ סָכָל  : et qui peut savoir s'il sera sage ou fou ? Indistingable de  :  הֶחָכָם עֵינָיו בְּרֹאשׁוֹ : Le sage a ses yeux dans sa tête.

L'article et l'interrogatif sont généralement distinguables par la présence du dagesh après l'article. Seuls les mots commençant par une gutturale peuvent générer une ambiguïté. Le cas d'un ה ou d'un ח avec un qamatz long est l'un d'eux.

Dans le dernier exemple, seul le contexte permet de distinguer la phrase affirmative de la phrase interrogative.